Les origines du dipladenia

Dipladenia est un nom générique qui n'a pas le même sens s'il est pronconcé par la bouche d'un pépiniériste ou par celle d'un botaniste. En effet, les dipladenias et les mandevillas que nous cultivons dans nos jardins et nos intérieurs ne sont que la face cachée et apprivoisée d'une vaste famille de plantes sauvages. Le dipladenia des pépinières et celui que l'on trouve à l'état naturel en Amérique du Sud ont tout, et pourtant plus grand chose, en commun. Nous allons tacher, sur cette page de nous pencher sur le ou plutôt les dipladenias "in situ" et leur histoire.

 

Un peu de géographie : dipladenia d'où viens-tu ?

Il existe plus d’une centaine d’espèces de dipladenias (ou mandevillas), toutes originaires de l’Amérique du sud équatoriale ou centrale, présentes dans des zones tropicales et subtropicales qui ont, selon leur environnement, des caractéristiques et des besoins qui peuvent légèrement ou beaucoup différer.

On pourrait shématiser en disant qu'il s’agit de plantes habituées à des climats doux, sans gel, avec une alternance binaire entre saison sèche et humide, sans gros écarts de températures. Toutefois, les espèces originaires des zones équatoriales qui proviennent des « rain forests » où il fait chaud et humide toute l’année avec des températures constantes autour de 25°C sont des plantes purement tropicales. C'est le cliché amazonien dans toute sa splendeur, celui qui sent bon la moiteur et le moustique. Ces plantes sont des lianes, habituées à l'ombre et à la forte humidité, qui poussent essentiellement en s'étirant à l'envi sous la canopée. Les fleurs, très espacées sur les tiges sont, au regard de nos dipladenias de salon, peu nombreuses. Ces espèces sont peu représentatives du dipladenia tel qu'on le connait ici. Elles sont difficiles à cultiver et à trouver dans le commerce.

 

Mandevilla hirsuta

Une espèce typique de la jungle équatorienne (présente en Guyane notamment) : Mandevilla hirsute aux tiges et aux feuilles pubescentes (poilues quoi !) - (Image : A.Popovkin-Wikimediacommons)

 

L’espèce type dont sont issus la plupart des hybrides horticoles buissonnants que l’on trouve en Europe, le Dipladenia sanderi, ou jasmin du Brésil, est originaire de la région de Rio de Janeiro. Mais tous les cultivars du commerce issus de croisements et de sélections, que l'on cultive en pot n'existent pas à l'état sauvage. Par la main de l'Homme, leur floribondité (capacité à fleurir) a été démultipliée, leur volubilité (développement par des longues tiges vigoureuses) a été réduite, deux facteurs qui les rendent désormais très dépendants à la luminosité. Placé à l'ombre, le dipladenia retrouve ses vieux reflexes de lianes : les tiges s'allongent, l'étagement entre les feuilles s'accentue et par voir de conséquence, puisqu'elles apparaissent à l'aisselle de celles-ci, les fleurs se raréfient.

 

Dipladenia sanderi

Le très classique Dipladenia sanderi, semi-grimpant à fleurs rouges - (Image : J. Opioła-Wikimediacommons)

 

Un peu d'histoire: dipladenia d'ou viens-tu ?

Les premiers spécimens ont été ramenés en Europe durant la première moitié du 19ème siècle par Georges Mandeville, un diplomate anglais féru de jardinage, envoyé pour un temps à Buenos Aires, qui introduisit à son retour en Angleterre le Mandevilla echites "laxa", une espèce grimpante à fleurs blanches également appelée jasmin du Chili. Par la suite, le genre Mandevilla fut classé en 1840 par John Lindey, éminent botaniste britannique. Présente sur une grande partie de l’Amérique du sud (Bolivie, Pérou, Argentine), endémique aux contreforts des montagnes, c’est l’espèce la plus rustique que l’on puisse trouver dans le commerce, mais ce n'est certainement pas la plus répandue. Le nom d’espèce « mandevilla » fut d’ailleurs donné en l'honneur de notre homme.

Pendant longtemps, la culture du dipladenia fut reservée aux jardiniers aristocrates anglais disposant d'une serre chaude. Plante de luxe, rare et admirée, le dipladenia était cultivé dans de très grands pots, magnifiquement juchés sur d'imposants treillages sphériques et exposé avec fierté dans les expositions horticoles. Ces sont les danois qui, à partir des années 50, ont redécouvert la plante et développé la production commerciale. C'est à Huguette et Robert Lannes, horticulteurs spécialisés, que l'on doit son introduction en France et l'impulsion à l'origine de son succès à la fin des années 90.

 

Planche botanique du dipladenia

Planche botanique du Dipladenia atropurpurea dessinée par le botaniste belge Louis Van Houtte vers 1855 - (Image: Wikimediacommons)

 

 

Un peu de taxinomie : dipladenia ou mandevilla ?

"Dipladenia" vient du grec "diploos" qui signifie "double" et de "aden" qui signifie "glande" en référence aux deux glandes qui se trouvent dans l'ovaire de la fleur, une des caractéristique de la plante. On est là dans la botanique de haut niveau, car c'est le genre de détail qui ne saute pas aux yeux. Quant à "Mandevilla", on l'a vu, il vient du nom de l'anglais qui l'introduisit en Europe au 19ème siècle.

Les dipladenias appartiennent à la famille des Apocynaceaes, (comme le laurier-rose et le jasmin étoilé) au sein de laquelle on a d’abord distingué plusieurs genres (dipladenia, mandevilla, macrosiphonia) avant que l’on englobe finalement toutes ces espèces dans le même sac et dans un même groupe. Aujourd’hui, mandevilla et dipladenia sont botaniquement considérés comme des synonymes mais les horticulteurs ont tendance à nommer "dipladenia" les espèces buissonnantes et "mandevilla" les espèces grimpantes, encore que cela ne soit pas toujours le cas. Il s'agit essentiellement d'une distinction commerciale sans justification botanique, destinée à simplifier les achats. Nous garderons ici cette distinction qui facilite effectivement la compréhension.

Retenez pour l'essentiel que la plante type, telle qu'on la rencontre le plus en jardinierie est le dipladenia et qu'il n'est que semi-grimpant ou alors simplement buissonnant.

 

Détail du feuillage d'un mandevilla

Mandevilla amabylis "Alice Dupont". Notez le feuillage gauffré caractéristique des mandevillas - (Image: John Rusk-Wikimediacommons)

 

De nos jours, des botanistes travaillent encore à la mise à jour de la classification phylogénétique de ces deux "espèces". C'est dire si le sujet est ardu. Toujours est-il qu'il est important de retenir la différence entre les deux noms, car elle renseigne, en théorie, sur le développement futur de la plante. On trouve en effet de nos jours des cultivars de tous gabarits, issus de savants croisements horticoles, des compacts et des semi-grimpants (dipladenia) ou des grimpants (mandevilla) dont le comportement, notamment la rapidité de croissance et l'encombrement, sont très différents. Certaines variétés naines ne dépassent pas 45 cm de hauteur quand d'autres grimpantes culminent à trois mètres ! D'où l'importance de savoir quel cultivar on achète exactement afin de ne pas avoir de mauvaise surprise. Ce n'est, hélas, pas toujours possible car dans les jardinieries les étiquettes sont bien souvent assez vagues. Les pépinièristes sérieux et consciencieux sont heureusement beaucoup plus précis à ce sujet. Cela dit, les exigences de culture sont sensiblement les mêmes pour tous.

 

Tentative de description : dipladenia qui es-tu ?

Nous l'avons vu, le dipladenia a, selon les espèces, plusieurs visages : grand buisson longiligne, petite ou longue liane volubile vigoureuse qui s’enroule autour des troncs ou des branches d'arbsutes dans le sens contraire des aiguilles d'une montre. Selon le profil, il aime pousser dans les anfractuosités rocheuses où le substrat est plutôt pauvre et l'eau rapidement évacuée ou bien en pleine jungle moite où le sol est humide et humifère.

 

Dipladenia in situ

Jeunes dipladenias à l'état sauvage, en sol sableux (et donc drainant), dans le parc Estadual da Serra dos Pirineu au Brésil (Image : Joao-medeiros-Wikimediacommons)

 

Quelle que soit la variété, le dipladénia est porté par des racines qui ont tendance à se tubériser rapidement, c'est-à-dire devenir épaisses et charnues. Elles constituent alors une réserve nutritive importante, accumulée durant les périodes fastes, sur laquelle la plante peut compter en cas de disette et de sécheresse. De croissance relativement rapide, les espèces grimpantes peuvent atteindre cinq à six mètres dans leur milieu naturel. En pot, quelle que puisse être leur vigueur, elles ne dépassent guère plus de deux à trois mètres de hauteur, tandis que les espèces compactes ne forment que des buissons.

 

Tuberisation des racines du dipladenia

Détail des tubérisations sur les racines (Image : Bio Jardin Services)

 

Le dipladenia émet de nombreuses tiges fines et souples qui s’entremêlent joyeusement en d'informes chignons, un peu comme les ipomées. Elles finissent par former un sac de nœuds fragile, qu’il est bon de guider de temps en temps vers le tuteur lorsqu’elles s’éloignent un peu trop de leur support dans le cas des espèces grimpantes. Faute de quoi, les tiges, trop frêles pour tenir toutes seules debout, retombent en cascade vers le sol... ce qui n'est pas dénué de charme non plus. Cependant les dipladenias buissonnants, dont la croissance est faible, restent relativement bien dressés sur leur tiges

Comme chez son cousin le jasmin étoilé (Trachelospermum jasminoides), le feuillage du dipladenia, est luxuriant, épais, coriace, lustré, d’un beau vert brillant qui lui confère une allure exotique. Les feuilles, opposées sont lancéolées (en forme de lance), parcourues en leur centre par une nervure marquée. Les feuilles du mandevilla sont généralement plus grosses, arrondies et gauffrées (l'aspect semble froissé) sur la surface.

 

Feuilles de dipladenia

Détail des feuilles du dipladenia (Image : Kim-Starr-Wikimediacommons)

 

Les fleurs, nombreuses, se succèdent durant près de sept mois. De cinq à douze centimètres de diamètre selon les espèces (celles des mandevillas sont plus grosses mais moins nombreuses), elles sont réunies en grappes portées par une hampe qui part de la tige à l'aisselle des feuilles. On distingue souvent sur la même grappe, des fleurs en boutons, des fleurs épanouies et des fleurs fanées. La cultivars du commerce sont auto-nettoyants, ce qui veut dire que les fleurs fanées tombent automatiquement au sol sans monter à graine et sans nécessiter de taille. Sur les espèces botaniques qui ne sont pas auto-nettoyantes, il vaut mieux couper les fleurs fanées afin d'éviter que la plante ne se fatigue à faire des graines, et favoriser les floraisons suivantes. Il n'est pas rare qu'en pleine période végétative, les gros dipladenias buissonnants étalent cinquante à cent fleurs en même temps ! Après fanaison, les fleurs des espèces botaniques se transforment en un long et fin folicule qui peut contenir plusieurs dizaines de graines. Leur présence sur la plante n'est dénuée d'intérêt esthétique, mais cela reste une affaire de goût.

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Insertion des fleurs de dipladenia

Détail de l'insertion des grappes de fleur (Image: Alex-Popovkin-Wikimediacommons)

 

En forme de trompettes, ouvertes ou étroites, les fleurs, facilement reconnaissables, comptent cinq pétales légèrement pointus qui se chevauchent plus ou moins, un peu comme une hélice de bateau. Les cultivars modernes ont déclinés l’espèce en coloris vifs, avec toute la gamme des rouges et des roses, ainsi que le blanc dont l’éclat tranche avec le feuillage vert foncé et brillant qui leur sert d’écrin. La longue floraison, qui s’étale de la fin du printemps jusqu’aux premières gelées de l’automne sans discontinuer, fait du dipladenia une valeur sûre en terme décoratif. Quant à l’appellation de jasmin du Brésil ou du Chili, elle en dit long, et à juste titre, sur la puissance et la qualité du parfum qui en émane.

 

Fleur de dipladenia

La fleur, si caractéristique (Image: T.Voekler-Wikimediacommons)

 

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