Les nouveaux standards ont banni de nos jardins les grands arbres fruitiers au profit de sujets plus petits, maintenus à des hauteurs restreintes par la taille de fin d’hiver. Il y a là, comme en tout, du bon et du moins bon.
Il est fini le temps où les arbres fruitiers mesuraient dix mètres de hauteur pour presque autant de large. Quand il fallait, pour cueillir leur lourde production, une journée entière, et au moins dix paires de bras, quatre escabeaux, trois acrobates, un torticolis, une grand-mère aux fourneaux, quelques apéritifs et une belle tablée conviviale. Désormais les fruitiers savent se tenir, ou du moins, les y oblige-t-on. Plus ramassés, moins hauts, moins larges, ils sont aussi beaucoup plus accessibles. Si bien que là où un seul arbre trônait majestueusement, on peut aujourd’hui placer plusieurs de ces petits fanfarons. Tant mieux ou tant pis, c’est selon les points de vue.
Sans doute parce qu’il n’y a plus dans les jardins autant de place que jadis, la hauteur moyenne des arbres fruitiers dans nos vergers a fortement diminué. Les grands arbres, dits de « plein vent », perchés sur un tronc en tige haute de 2 m, à la ramure peu ou pas taillée, ont cédé la place à des sujets plus petits, de 2 m 50 de hauteur pour trois à quatre de largeur. Leur tronc mesure entre 50 cm de hauteur (basse tige) et 1 m50 m (demi-tige) et leur quatre à cinq branches charpentières partent en diagonales vers l’extérieur. Cette forme ramassée caractéristique, plus large que haute, en forme de gobelet, est généralement complétée par la suppression quasi complète des rameaux qui poussent au cœur de l’arbre, afin de permettre un ensoleillement maximal et une saine circulation de l’air.
L’intérêt de ces arbres fruitiers bas, à condition d’effectuer une taille annuelle adaptée, est de permettre une grande productivité de gros fruits, sur une surface relativement réduite. De plus, la majeure partie de l’arbre est accessible depuis le sol, et un escabeau suffit pour en atteindre le haut. Il est bien évident qu’à partir de là, les travaux de traitement, de taille et la cueillette sont grandement facilités. L’autre intérêt majeur est de pouvoir planter, sur la même emprise au sol qu’un grand fruitier, jusqu’à quatre individus différents. On peut ainsi opter pour plusieurs espèces (cerisier, pommier, prunier…) ou dans le cas d’une même espèce, pour plusieurs variétés, afin de croiser efficacement les pollinisations, mais aussi, en jouant sur la précocité, pour étaler les périodes de récolte. On ne croule plus sous la production énorme d'un seul et même arbre, mais on peut au contraire, cueillir sur plusieurs semaines, une brassée de fruits frais.
Le principal inconvénient de la taille en gobelet est qu’ilelle nécessite au moins une taille annuelle, en fin d’hiver. Cette taille est primordiale, avant tout, évidemment, pour tenir l’arbre à la hauteur souhaitée. Mais elle l’est tout autant pour éviter les phénomènes d’alternance en permettant une production régulière d’année en année. Elle encourage également l’apparition d’un maximum de fruits, à toutes les hauteurs et au plus près des branches charpentières. Mais elle requiert de la part du tailleur beaucoup de connaissances et d’expérience, qu’il s’agisse des arbres à noyau, ou plus encore, des arbres à pépins. Enfin, chaque point de taille formant potentiellement une porte d’entrée pour les maladies cryptogamiques, les traitements sont généralement plus fréquents. Il est d’ailleurs intéressant de constater qu’un arbre taillé vit généralement deux fois moins longtemps qu’un arbre de plein-vent.
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Les grands fruitiers « plein-vent » régulent plus naturellement leur mise à fruit, et n’ont pas besoin d’une taille régulière. Moins contraints et blessés par les tailles, ils sont en meilleur forme et requièrent peu de traitements contre les maladies cryptogamiques. Ils ont dans l’ensemble tendance à produire des fruits un peu plus petits, mais sont capables dans des conditions normales de culture, de vivre centenaires.