Les jardiniers de l'arrière-pays méditérranéens, gloire à eux, cultivent des sols qui sont très argileux. Une spécificité qui n'est pas anodine dans la manière de mener son jardin, bien au contraire.
Il n’y a guère que dans les plats pays qu’on ne voit pas d’escalier dans les jardins. Et c’est bien dommage car, comme dirait Clémenceau, « le meilleur moment de l’amour, c’est quand on monte l’escalier ».
Le sol est composé de particules minérales qui, selon leur proportion, caractérisent sa structure : les argiles (- de 2 µm de diamètre), les limons (2 à 200 µm) et les sables (0,2 à 2 mm). Selon le pourcentage de chaque composant, les sols sont à dominante argileuse, limoneuse ou sableuse.Dans l’arrière-pays méditerranéen, sauf exception, nous avons affaire à un sol très argileux. Une terre argileuse est composée d'au moins 30% d'argile. Elle est lourde, compacte, et très collante lorsqu’elle est humide. Elle retient si bien l'eau qu'elle s'engorge vite lors des fortes pluies, laissant en surface des flaques d'eau stagnante qui ne parviennent pas à s’infiltrer. Elle est pratiquement impossible à travailler tant qu'elle n'est pas correctement ressuyée (sèche), car cette "terre amoureuse" aux outils du jardinier. Une fois mouillée, elle est très lourde, ce qui rend les gestes et les déplacements fatigants : les outils et les bottes auxquels la terre adhère pèsent une tonne ! Si on la travaille alors qu’elle est encore gorgée d’eau, elle se transforme en grosses mottes compactes sous l'action des outils de labourage (bêche, motoculteur...). Une fois bien sèches, ces mottes durcies sont très difficiles à casser. Conclusion, on ne travaille jamais un sol argileux avant qu'il n'ait suffisamment ressuyé. Il est fréquent que les terres du sud de la France soient constituées de plus de 40% d'argile.
"Lorsque le sol est bien mouillé, si vous prenez une boule de terre et que vous pouvez en faire un anneau, c’est qu’il est argileux.
Le fameux test de l'anneau (ou du boudin)
Image: Bio jardin Services
Lorsqu’il est sec, un sol argileux est très dur. Il se fissure sous l’effet de la sécheresse, un phénomène appelé battance. Il est dû à la formation d’une solide croûte de surface provoquée par l’impact des gouttes de pluie qui fragmentent et transforment argiles et limons en fine boue. Celle-ci, en séchant, va boucher les entrées capillaires présentes à la surface du sol, qui permettent en temps normal les échanges liquides et gazeux entre la surface et le sous-sol. La pénétration de l’eau et de l’air sont rendus plus difficiles, voire impossibles. Le sol s’assèche, se compacte et durcit. En terrain très argileux, il se fissure même de manière caractéristique. Dans cette terre devenue trop compacte et totalement asphyxiée, les micro-organismes vivant dans le sol disparaissent, et par effet boule de neige, le taux d'humus chute rapidement. Les phénomènes d’érosion naturels dus au vent et aux pluies s’accentuent. Il faut alors un travail important de labour et de binage pour le décompacter et en permettre à nouveau la culture. En outre, avec la battance, des problèmes peuvent apparaitre au moment des semis, les graines ayant parfois du mal à percer la croûte et à germer
Les terres argileuses soumises aux passages répétés des personnes, des machines ou des véhicules, celles travaillées avec excès par un labour mécanisé (motoculteur) et trop profond, les terres pauvres en matières organiques et faiblement humifères sont d’autant plus sensibles au phénomène de battance. Fort de ces précisions, on comprendra aisément que c’est un problème qui touche fréquemment les sols exploités en agriculture intensive. Clairement, la battance peut être assurément considérée comme étant un indicateur de la dégradation d’un sol.
Fissures typiques de la battance
Image:Bio jardin Services
Très compacte, la terre argileuse gêne la circulation de l’eau et de l’air dans la terre, mais aussi l'enracinement des plantes. De plus, sa grande capacité de rétention de l'eau provoque l'engorgement des sols, y compris en profondeur. Dans notre région, c'est assez fréquent lors des automnes et des hivers pluvieux. Or, de nombreuses plantes ne supportent pas l'eau stagnante au niveau des racines. Cela provoque des asphyxies et des nécroses racinaires entrainant le ralentissement de la croissance ainsi qu'une faiblesse généralisée, propice à l'apparition de maladies. C'est le cas des plantes à bulbes, mais aussi de la plupart des arbres fruitiers et de nombreuses autres plantes. Il est donc très important lors de la plantation des végétaux délicats de mélanger à parts égales, de la terre du jardin, du terreau ou du compost mûr, ainsi qu'un élément drainant et décompactant comme du sable grossier (type couscous) ou mieux de la pouzzolane de petit calibre (2/5 mm). Incorporés à la terre de plantation, ils empêchent que celle-ci ne se tasse et permettent aux racines de se frayer un chemin le long de leurs parois.
"Pour alléger un sol argileux, on peut y apporter du sable. A condition qu'il ne soit pas trop fin (> 2/4mm) sinon il se compacte. Il ne faut pas avoir peur des travaux : pour un sol contenant 40% d'argile, comptez 50 litres par m2, soit 5m3 pour 100m2 !"
Sol gorgé d'eau, trois jours après une forte pluie
*Image:Bio jardin Services
Achevons de vous convaincre que les sols que vous cultivez sont sérieusement argileux, en déroulant la liste des plantes sauvages qui se plaisent dans de telles terres. Ces végétaux spontanés, dits bio-indicateurs, et souvent appelés "mauvaises herbes" sont un indice qui permet, en observant le terrain d'avoir une idée de ses spécificités. Citons parmi ces amatrices d'argile et de sols compactés, le grand plantain (Plantago major), le chardon à capitules (Carduus tenuiflorus), le chiendent (Cynodon dactylon), la fausse roquette (Erucastrum nasturtiifolium), le liseron des champs (Convolvulus arvensis), le pissenlit ou le trèfle des champs pour ne citer que les plus connues. Voilà des plantes que l'on retrouve fréquemment dans nos jardins pour peu que l'on laisse le sol en jachère durant quelques mois. En général, toutes les plantes bio-indicatrices, aussi étonnant que cela puisse paraitre contribuent à régler le problème qu'elles indiquent. Dans le cas présent, par leur longue racine pivotante ou leur système racinaire dense, elles participent à la décompaction des sols. Plus incroyable encore, elles finissent par disparaitre une fois que leur présence a fini par modifier la structure d'un sol, dont les caractéristiques sont devenues moins favorables à leur croissance.
Quoi ? La meilleure manière de se débarrasser du liseron serait de laisser s'étaler ses longs rhizomes décompactant dans nos plates-bandes ? Voilà une info contre-intuitive que l'on va sans doute devoir vous laisser assimiler et digérer longuement avant d'y revenir dans un prochain article.
- Plantes de haie (persitantes) : laurier-tin, filaire, nerprun, laurier-sauce, myrte, buplèvre...
Arbustes et arbrisseaux à fleurs : lavande, cornouiller, ciste, romarin, santoline, genêt, thym...
Vivaces : euphorbe, valériane, scabieuse, sédum, acanthe, asphodèle, achillée...
Arbres : érable de Montpellier, sumac, olivier, arbre de Judée, micocoulier, pistachier thérébinthe, chêne vert, arbre à perruque...
Parmi les plantes non endémiques que l'on peut trouver dans le commerce, on peut citer :
Plantes de haie : fusain, troène, cotonéaster, pyracantha...
Arbustes et arbrisseaux à fleurs : millepertuis, lavatère, mahonia, phlomis, viorne, spirée, vitex, sauge arbustive, buddléia...
Vivaces : knipholia, gaura, perovskia, hellebore, ail ornemental, anémone du Japon, rudbeckia, aster, muscaris, iris...
Arbres : sureau, mélia, murier-platane, tilleul, peuplier, noisetier...
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