Tous les légumes, et la tomate en particulier, gagnent à être arrosés le moins possible, pour gagner en saveur, en vigueur et éviter les maladies.
Mesdames et messieurs, ce soir, sur la piste aux étoiles du potager, devant vos yeux hallucinés, notre intrépide jardinier va pour une saison de plus procéder à l’arrosage de ses tomates ! Entrez, entrez, et venez admirer avec quelle dextérité ce funambule va distiller son eau, en marchant sur un fil tendu au-dessus de l’excès et du manque. Public, retiens ton souffle, car il va s’élancer sans filet. La moindre erreur pourrait lui être fatale et compromettre ses récoltes. Attention, roulement de tambour !
Bien qu’il s’agisse du légume le plus cultivé dans les potagers, la tomate est sans aucun doute celui dont l’arrosage requiert pourtant le plus de doigté. L’erreur la plus commune consistant à l’arroser quotidiennement et abondamment ce qui a pour principal effet d’en atténuer le goût. En effet, si par cette méthode on obtient de gros fruits, leur chair saturée d’eau devient rapidement insipide. De plus un excès d’eau peut provoquer l’éclatement de la peau, ce qui peut engendrer des pourrissements, compromettre la conservation des fruits et ouvrir la porte aux attaques d’insectes ou de maladies.
A l’inverse, et contrairement à ce que l’on croit, la tomate résiste relativement bien au manque d’eau. Mais cette grande comédienne a tôt fait d’apitoyer les jardinier en arborant durant les journées chaudes de l’été un feuillage retombant, semblant se tenir au bord du flétrissement. C’est une manière de s’adapter aux grosses chaleurs, comme le font également les aubergines ou les cucurbitacées, les feuilles revenant généralement à l’horizontale dans la soirée. Petite coquine !
Pour la tomate comme pour toutes les plantes, il est plus intéressant de faire des apports d’eau espacés mais conséquents (le mieux étant à l'arrosoir), plutôt que des petits arrosages quotidiens. Ainsi l’eau peut descendre en profondeur où elle sera moins sujette à l’évaporation. Cela a pour conséquence d’obliger la plante à émettre des racines pour aller puiser l’humidité loin dans le sol, plutôt que de rester en surface à boire sans effort l’eau de surface. Avec un système racinaire contraint à être plus développé, solidement ancrée dans le sol, la plante devient de facto plus vigoureuse et donc d’avantage résistante aux agressions extérieures (maladies, ravageurs, vent…).
Une des particularités de la tomate est de ne pas supporter les arrosages irréguliers. Un coup oui, un coup non, un coup beaucoup, un coup peu, voilà comment se développe la nécrose apicale, plus communément appelée cul noir, une maladie qui porte bien son nom. Mieux vaut donc s’en tenir à des apports réguliers en fréquence et en volume. Evidemment, la pluie peut venir troubler cet ordre établi. Régulez aussi vos arrosages en fonction d'elle.
La fréquence idéale d’arrosage dépend bien-sûr de la région où vous habitez, mais aussi de la nature de votre sol. En effet, selon qu’il est sableux, limoneux ou argileux, il ne retiendra pas l’eau de la même manière. Avec un gros paillage (o-bli-ga-toire !) d’environ 10 cm d’épaisseur de paille, de broyat, ou de feuilles mortes, qui va beaucoup limiter l’évaporation, la plante doit pouvoir se contenter d’un arrosage moyen d’environ cinq à dix litres par semaine et par pied, en une seule fois. A vous ensuite d’ajuster les doses selon la réaction de vos tomates. Attention, évitez absolument de mouiller le feuillage lors de l'arrosage sous peine de favoriser l'apparition du mildiou, LA maladie cryptogamique qui fait des ravages sur les plants de tomates.
Deux camps s'affrontent au sujet du meilleur moment de la journée pour arroser les tomates. Les tenants du soir (après 19h) arguent que l'eau a le temps de bien descendre dans le sol et les racines de s'imprégner d'humidité, sans risque d'évaporation due au soleil. Pas faux. Les tenants du matin pensent eux que la stagnation de cette humidité en surface du sol pendant plusieures heures favorise le développement des maladies cryptogamique et que cela attire les limaces. Pas bête. Puisqu'il n'y a pas à ce sujet de vérité absolue , essayez les deux techniques et faites-vous votre propre opinion.
En Provence, la question de l'arrosage de la tomate est primordiale. Première chose indispensable, un paillage très épais jusqu'à 15 ou 20 cm (!), pour éviter l'évaporation, protéger le sol des UV et créer de l'humus, grand rétenteur d'eau devant l'éternel. Deuxième impératif, un arrosage profond et aussi espacé que possible. Idéalement deux fois par semaines au plus chaud de l'été doivent suffire. D'autant que nos sols naturellement argileux ont la faculté de retenir l'eau qu'on y verse. A vous de trouver le volume adéquat à apporter pour que vos plants s'y adaptent, généralement entre 5 et 10 litres par apport. Concernant le moment, il est indéniable que l'arrosage du soir est beaucoup mieux exploité par les plantes. A vous de voir si cela ne créé pas les inconvénients mentionnés plus haut. Attention si vous arrosez le soir, aux chocs thermiques provoqués par l'utilisation d'eau trop fraiche (celle issue des forages profonds notamment). Il peut en résulter des nécroses racinaires et des pourrissements, qui sont des causes fréquentes de maladies cryptogamiques. Evidemment, le matin, après une nuit de relative fraicheur, ces chocs sont moins violents qu'en fin de journée caniculaire... Sinon, vous pouvez laisser réchauffer l'eau quelques heures dans les arrosoirs avant de les déverser.